Contrairement à ce que l’on pourrait croire, la profession de détective privé ne se limite pas à la résolution d’enquêtes d’infidélité. Depuis quelques années en France, le champ d’intervention du détective s’est considérablement étendu : citoyens, entreprises ou administrations font de plus en plus appel à eux pour intervenir dans leurs affaires personnelles ou professionnelles. Ses missions concernent désormais le domaine des affaires familiales (pensions alimentaires, conflits familiaux…), commerciales (enquête de solvabilité, concurrence déloyale, détournement de clientèle…) ou morales. Mais ce n’est rien à côté des États-Unis où son intervention en milieu judiciaire est quasiment systématique et leur nombre est plus élevé qu’en France (il y a plus de détectives que de policiers…). Ainsi, le détective privé en France exerce-t-il de la même façon aux États-Unis ? Quelles sont les limites de la profession ?
Une profession plus répandue et reconnue qu’en France
On compte trois fois plus d’agents privés que de policiers aux États-Unis et d’ailleurs le ratio des agents privés par habitant est aussi trois fois plus important qu’en France. Le marché de la sécurité privée en Amérique est d’ailleurs très lucratif : il représenterait un chiffre d’affaires de 65 milliards de dollars.
Pratique plus répandue qu’en France, les « private investigators » seraient plus de 50 000 à exercer leurs fonctions, un nombre qui augmenterait régulièrement car les professionnels de la justice font appel à eux de manière quasiment systématique lors d’affaires pénales, mais aussi parce qu’on assiste à une recrudescence des actions en justice et de la cybercriminalité.
Historiquement, la profession de détective privé aux États-Unis est étroitement liée à celle du milieu judiciaire car beaucoup de détectives sont d’anciens policiers, militaires, issus du FBI ou encore du renseignement. Ils débutent donc leur carrière de détective avec un large réseau d’influence dans le milieu, une connaissance aiguisée de l’enquête ainsi que des sources d’informations fiables et nombreuses.
Pas de formation obligatoire pour exercer aux États-Unis
Contrairement à la France, tout le monde (ou presque) peut devenir détective aux États-Unis car la profession ne demande pas de formation spécifique comme c’est le cas chez nous. En effet, la profession d’agent de recherches privées étant réglementée, tout aspirant détective est tenu d’obtenir un diplôme homologué agréé par la Commission Nationale de Certification Professionnelle (CNCP).
Dans la majorité des États d’Amérique, aucune étude ou certification n’est exigée pour exercer. Certains États demandent malgré tout une bonne conduite (contrôlée par le FBI et le département de la Justice), une expérience de 3 ans dans le milieu de l’investigation et des connaissances dans la police scientifique et la criminologie ou bien une licence professionnelle.
Une collaboration étroite entre avocats et détectives
En France, même si les avocats, notaires ou huissiers peuvent faire appel à un détective privé pour les aider dans leurs dossiers, ce n’est pas une pratique aussi courante qu’aux États-Unis. Dans notre culture, la recherche de vérité dans une affaire criminelle incombe en priorité à l’État.
De l’autre côté de l’Atlantique, le détective est souvent embauché par l’avocat, notamment dans les affaires pénales, ou il va apporter des preuves importantes pour la résolution de l’enquête. Certains avocats ont même plusieurs détectives salariés au sein de leur cabinet !
L’affaire DSK illustre bien cet exemple : les avocats de la défense travaillaient avec plusieurs détectives salariés au sein de leur cabinet. Ils étaient à la recherche d’informations susceptibles de décrédibiliser le témoignage de la victime : ils ont parcouru les quartiers ou elle a vécu et interrogé des personnes qui la connaissaient bien. Même si ce type d’information n’est pas recevable au procès, les détectives parviennent toujours à identifier des témoins potentiels et des informations clés pour l’enquête.
Grâce à internet, les ressources d’information sont impressionnantes et très utiles pour le détective qui souhaite enquêter pour le compte de ses clients. Cependant, aux États-Unis, les lois de protection de la vie privée limitent de plus en plus l’accès à certaines données. Par exemple, il devient difficile, dans certains États, d’identifier un individu à l’aide sa plaque d’immatriculation. Mais les détectives privés disposent de plus d’une corde à leur arc : ils sont très proches de lobbyistes qui les soutiennent pour éviter le passage de nombreux projets de loi qui seraient trop restrictifs pour leur profession.
La profession de détective privé est donc plus reconnue et pratiquée aux États-Unis qu’en France. Cela s’explique par l’étroite collaboration qu’il existe entre avocats et agents privés depuis des décennies, l’accès simplifié à l’exercice du métier qui ne requiert pas de formation spécifique et obligatoire pour exercer dans de nombreux États et aussi par la présence et la représentation de longue date du détective privé dans l’imaginaire collectif américain.